Maman, je vais y aller à l’école ?

275997116_da9373ad7b Un coup de gueule pour expliquer qu’encore une fois, entre les grandes déclarations avec trémolos dans la voix, et la réalité du terrain, il y a un décalage gouffre.
Choupinetto (le prénom a été changé pour conserver l’anonymat) a 4 ans. Bien qu’il soit né en 2004, il n’a pas encore été scolarisé. Car Choupinetto a un léger retard psychomoteur. L’année de ses 3 ans, il a été suivi par le CAMSP, et il n’était pas encore prêt pour intégrer l’école maternelle.

Il est également suivi par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) qui lui a accordé en août, le droit à une Auxiliaire de Vie Scolaire.
Avant les vacances d’été, sa maman a rencontré la directrice de l’école du village, elle lui a expliqué le retard de Choupinetto et le fait qu’avec la propreté, ce n’était pas encore gagné.
La directrice s’est montrée compréhensive et lui a dit que propre ou pas, AVS ou pas, Choupinetto pourrait faire sa rentrée à l’école maternelle.
En effet, la nouvelle loi sur l’accueil des enfants handicapés en milieu scolaire précise que les écoles doivent accepter les enfants de 3 ans révolus, et ne peuvent refuser d’intégrer un enfant pour une histoire de couches.

Alors Choupinetto était tout heureux, il a visité son école, rencontré ses futurs petits camarades de jeu, et s’est mis en tête que la rentrée, c’était aussi pour lui.

Oui mais voilà, pendant l’été, la directrice de l’école est passée dans une faille spatio-temporelle et à une semaine de la rentrée, le son de cloche avait changé.

La MDPH a beau avoir attribué une auxiliaire de vie scolaire à Choupi’, cela ne veut pas dire que l’Education Nationale va la recruter. Bien sur pour simplifier encore plus les choses, la réponse positive ou négative ne tombera que jeudi, 4 jours avant la rentrée. C’est eux qui pourront dire si l’auxiliaire a bien été recrutée et accompagnera Choupi’ pendant sa première année de maternelle.

En tout cas, la position de la directrice est ferme : Pas d’auxiliaire scolaire, pas de propreté acquise un minimum, pas de rentrée pour Choupi’.

Encore une fois, les beaux discours et les chiffres détournés cachent une réalité du terrain bien différente et bien douloureuse pour les enfants handicapés et leurs parents.
Les chiffres sont pourtant faciles à interpréter :

Pour l’année 2007 – 2008, le nombre de jeunes en situation de handicap, scolarisés dans un établissement ordinaire est estimé à près de 162 100.

Le potentiel d’accompagnement créé et mobilisé au cours de l’année scolaire 2007-2008 est de plus de 19 800 emplois dont près de 17 900 peuvent se consacrer aux mesures d’accompagnement individuel décidées par les commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées.

Total : 11% des enfants handicapés seulement bénéficient d’une AVS en milieu scolaire ordinaire.

Bien sur je ne jette pas l’opprobre sur l’école, la directrice ou même l’institutrice. Quand on a 30 enfants de 3 ans à gérer toute la journée, comment imaginer trouver du temps à consacrer à un enfant handicapé ?

Ce matin, la maman de Choupi’ a décroché son téléphone en tremblant, a invoqué tous les dieux du monde entier ainsi que leurs saints, et a appelé les services académiques. Les yeux sur Choupi’, elle a eu une personne au bout du fil, et avec une grosse boule dans la gorge, elle a demandé si une AVS avait bien été recrutée et si Choupi’ pourrait faire sa rentrée lui aussi.

Les Saints étaient avec eux, une AVS l’accompagnera bien pendant sa première année de maternelle, 24 heures par semaine. Mais les Dieux sont restés un peu sourds : on ne sait pas encore quand.

La directrice de l’école a tout de même quitté sa faille spatio-temporelle et accepté de prendre Choupi’ pour la rentrée, même sans AVS, même avec des problèmes de propreté.

Pour autant, même si cette histoire se termine plutôt bien, le flou artistique qui se dégage du recrutement et de la formation des AVS, de leur nombre et de leur type de contrat, laisse penser que la scolarisation des enfants handicapés en milieu scolaire est loin d’être gagnée.

Pour certains enfants qui sont trop en décalage, les CLIS, classes spécifiques pour enfants handicapés, avec passerelle vers des classes ordinaires, sont un très bel outil, mais le problème de leur nombre et du recrutement des professionnels dans ces classes est aussi bien en-deça de ce qu’il faudrait pour donner une chance à tous de s’épanouir, de satisfaire leur curiosité, leur soif d’apprendre et d’avoir une vie sociale !

Bref, si Choupi’ a eu beaucoup de chance, il n’en va pas de même pour de nombreux autres enfants handicapés qui n’auront pas une AVS à disposition. Il y a encore beaucoup d’efforts à fournir de ce côté-là.

(8 commentaires)

  1. Félicitation c’est déjpa un bon début… Mon fils a 2 ans et demi et est dans le même cas que le vôtre. Il commence lui aussi la crèche ce lundi 1er septembre avc toutes les mêmes préocupations. Comme nous habitons en Espagne et que nous ne connaissons pas d’autres enfant dans le même cas, nous ne savons pas à quoi nous attendre. Toujours est-il que la directrice de la crèche n’a pas jugé bon d’embaucher une AVS. Il semblerait qu’ici, cela se fasse sur la marche. Pas très rassurant. Heureusement que lundi on peux rester avec lui les deux… On verra combien de puéricultrices il y a dans sa classe et pour combien d’enfants… Aïe Aïe Aïe, ça promet…
    Bonne continuation….

  2. un petit mot suite à ce bel article 🙂 pour dire que la rentrée s’est plutôt bien passée, et que l’AVS devrait arriver finalement à la mi-octobre. Choupi et sa maîtresse l’attendent avec impatience!
    Stéphanie, Choupi a fréquenté plusieurs crèches sans soucis ni personnel particulier, il a simplement été intégré dans la tranche d’âge en dessous de la sienne, et les puéricultrices se sont adaptées. j’espère que ça a été également le cas pour vous.

  3. Salut,
    Ca m’interesserais beaucoup de trouver le texte qui stipule que « les écoles doivent accepter les enfants de 3 ans révolus, et ne peuvent refuser d’intégrer un enfant pour une histoire de couches ».
    Par contre pour le problème de liaison de la présence de l’AVS à la scolarisaiton là j’ai un texte qui pourrait t’aider : http://www.education.gouv.fr/bo/2003/25/MENE0301317C.htm
    C’est marqué noir sur blanc dans le document.
    Jacques

  4. Bonjour !
    Pour la maman de Choupi, une grande Ola pour ce dénouement heureux (c’est que ca n’a pas été si facile !).
    Jacques, sur le même site que vous donnez :http://www.education.gouv.fr/cid207/la-scolarisation-des-eleves-handicapes.html
    Il est noté que « Scolarisation des élèves handicapés
    Dès l’âge de 3 ans, si leur famille en fait la demande, les enfants handicapés peuvent être scolarisés à l’école maternelle. Chaque école a vocation à accueillir les enfants relevant de son secteur de recrutement. Pour répondre aux besoins particuliers des élèves handicapés, un projet personnalisé de scolarisation organise la scolarité de l’élève, assortie des mesures d’accompagnement décidées par la Commission des droits et de l’autonomie (C.D.A.). »
    Pour les couches, c’est la même problématique que n’importe quel enfant. Nulle part officiellement, on ne demande
    aux enfants d’être propre (d’ailleurs certaines écoles acceptent les couches) mais la réalité est bien souvent autre.
    D’un autre côté ce « cher » ministre de l’Education se demande s’il faut BAC+5 pour changer des couches, ca me laisse songeuse…

  5. Jacques, comme le stipule l’extrait cité par Christine, si l’enfant a plus de 3 ans, est reconnu comme handicapé, dont les parents souhaitent la scolarisation et a un avis favorable du CDA, l’école devrait l’accueillir, couches ou pas couches. dans la réalité, ce n’est malheureusement pas toujours aussi simple.
    par contre, pour un enfant ‘normal’, avant ses 6 ans, il me semble que l’école demande qu’il soit ‘prêt’ à la scolarisation. et pour beaucoup d’écoles, ‘être prêt’, c’est être propre…
    sinon, merci beaucoup pour le lien, je le garde sous le coude.
    Christine, j’ai une amie, BAC+4, qui souhaitait préparer le concours de professeur des écoles, et qui a posé sa candidature pour être AVS et acquérir ainsi une expérience intéressante pour son projet. on lui a répondu qu’elle était ‘trop diplômée’… et pourtant, je cite juste un extrait du site donné par Jacques:  » L’ajustement de ces interventions doit se faire en fonction d’une appréciation fine de l’autonomie de l’élève et tenir compte de la nature et de l’importance des activités. »
    noooon, c’est sûr que il n’y a pas besoin de faire d’études pour évaluer des choses finement, s’adapter à l’évolution de besoins d’enfants différents, et de savoir doser son intervention dans le déroulement d’une classe, pour être efficace, mais sans gêner les autres élèves, et en permettant à l’enfant d’acquérir son autonomie!

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