Travailler et allaiter, facile ou non?

  C’est souvent une fois que l’allaitement est bien lancé qu’une maman doit, à regret, commencer le sevrage pour reprendre le travail.  Cependant il faut savoir que la reprise du travail n’est pas synonyme de sevrage — et que continuer l’allaitement en travaillant permet d’atténuer quelque peu la douleur de la séparation.   Tirer son lait pendant la journée de travail est faisable, à condition de bien s’organiser, de bénéficier d’un environnement de travail (un peu) favorable, et d’éduquer (patiemment) sa nounou, son assistante maternelle, ou la directrice de sa crèche…

Lorsque j’ai repris le travail six mois après la naissance d’Emilie, j’avais décidé de tirer mon lait au travail. L’obstacle principal était qu’il n’y avait pas d’endroit où tirer mon lait (bureaux paysagers, toilettes sans prise électrique.) Le service RH m’a  trouvé une solution: la salle du conseil d’administration.  Bonne idée sauf que la porte ne fermait pas de l’intérieur.  Je tirais mon lait avec l’inquiétude permanente que la porte s’ouvre, ce qui arrivait régulièrement!  Au bout d’un mois, fatiguée, stressée, et ayant du mal à tout concilier, j’ai sevré Emilie et lui ai donné du lait artificiel dans la journée.  Nous avons continué les tétées matin et soir jusqu’à ce qu’elle ait 11 mois. 

Avec le recul, le plus difficile quand je tirais mon lait au bureau, ce n’était pas les conditions pratiques difficiles, mais le fait que cela soit un secret.  J’avais un poste à responsabilités dans un milieu un peu macho ou je devais me « prouver » au retour de congé de maternité et je n’avais parlé de mon allaitement à personne.

Voici mes conseils pour tirer votre lait au travail :

• Connaître ses limites: pour travailler et tirer son lait sans se fatiguer il faut du temps pour soi, pour bien manger, pour bien dormir, pour s’organiser — et il faut un rythme de travail qui permette des interruptions.  Si votre poste est stressant, avec des horaires lourds, ce ne sera pas facile de tirer votre lait au travail, et pour tenir le coup sur la durée il faudra faire encore plus attention à vous ménager par ailleurs.
• Exiger de votre patron un bureau privé fermant à clef (je plaisante!)
• En parler: si c’était à refaire, j’en parlerai à mes collègues.  Cela aurait été meilleur pour mon moral, et j’aurais certainement tenu plus longtemps. 
• Prévoir des hauts adaptés, c’est à dire des couleurs et matières qui cachent les éventuels écoulements de lait et des tenues avec lesquelles vous pouvez allaiter bébé facilement quand vous le récupérez le soir.
• Prévoir des hauts, soutiens-gorge de rechange, et compresses d’allaitement à garder au bureau en cas d’écoulement de lait ou « d’accident de tire lait . »
• Pour dissimuler les coussinets d’allaitement, deux options: mettre un soutien-gorge légèrement rembourré, ou choisir les nouvelles compresses d’allaitement invisibles LilyPadz en silicone vendues en ligne dans plusieurs boutiques.
• Investir dans le meilleur des tire-laits.  J’avais le Pump In Style de Medela, cher, mais très efficace grâce au double pompage, et pratique avec le compartiment réfrigéré inclus.  L’idéal est d’avoir, en plus du tire-lait électrique, un petit tire-lait manuel simple et peu encombrant à mettre dans votre sac si vous êtes en déplacement pour la journée, ou coincée en réunion chez un client, et que vous vous retrouvez avec des seins engorgés. 
• Trouver un moyen pour faire tenir les téterelles du tire-lait électrique « toutes seules » afin de pouvoir écrire, taper sur un clavier, ou téléphoner pendant que vous tirez votre lait.  Il y a des bustiers « spécial tire-lait » sur le marché ou vous pouvez bricoler un vieux soutien-gorge. Ce qu’il faut éviter c’est la sensation angoissante de tirer son lait en regardant les minutes qui défilent et le biberon qui ne se remplit pas assez vite.  Au moins si vous travaillez ou bouquinez le temps passera plus vite.  Et comme vous êtes détendue, vous tirerez plus de lait.
• Se motiver: avoir une photo de votre bébé scotchée dans le sac de votre tire-lait.  Rien qu’à regarder sa petite bouille adorable, vous aurez une montée de lait!
• Boire, boire, boire.  L’air climatisé déshydrate et la déshydratation diminue la production de lait.
• Avoir des en-cas dans son bureau (barres de céréales, fruits secs) pour éviter les coups de pompe.
• Faire des réserves de lait avant de reprendre le travail.
• Faire garder votre bébé par quelqu’un qui accepte de donner du lait maternel, et bien former cette personne aux méthodes de conservation et de réchauffage.  En crèche, l’accueil peut varier mais la ville de Paris a récemment publié un très bon document à destination des professionels de la petite enfance: Allaitement maternel et crèche
• Se dire que cela en vaut vraiment la peine.  Quand on voit les avantages du lait maternel, on oublie les difficultés rencontrées. Et savoir qu’on donne le meilleur à son bébé, même après la reprise du travail, cela supprime une sacrée dose de culpabilité.

Pour plus d’info:

– La Leche League

– Lactitude

– Medela